Lors d’une belle conférence où il s’est livré avec courage et dans toute sa vulnérabilité, Christophe Fauré nous a partagé son parcours, depuis son enfance jusqu’à aujourd’hui, un parcours qui l’a amené à … s’aimer enfin !
Petit enfant, il se retrouve rapidement seul avec une maman dépressive. Il s’escrime alors à la « sauver », des tentatives qui le vident de son essence, et le rendent à son tour dépressif, à tel point qu’il devra être pris en charge et soigné à l’adolescence, au risque de « se fragmenter ». Devenu adulte, il déplace ce syndrome du sauveur sur ses patients en psychiatrie. Il se décrit alors lui-même comme « un toxico de la relation d’aide ». Tant et si bien qu’à 40 ans, il est épuisé, éteint, c’est le « burn-out ». Il se demande : « est-ce que ça se résume à ça ma vie ? ».
Il fait une rencontre, un ami lui dit : tu as besoin de re-spirer, et lui propose alors de vivre une expérience spir-tuelle. Il devient alors moine tibétain, apprend la langue, les enseignements, renonce à toutes ses possessions matérielles, à l’amour charnel, pendant plusieurs années. Il comprend que la robe de moine pointe un chemin qui peut inspirer d’autres à l’emprunter, il définit la spiritualité comme une boussole, qui pointe toujours vers le Nord, incarnation de la lumière qui inspire, qui éveille.
Il croise des « éveillés ». Ce qui en fait des maîtres spirituels, selon Christophe Fauré, c’est leur capacité à mettre en résonance, tel un diapason, notre essence, qui est indifférenciée du reste du monde.
D’ailleurs, alors qu’il se sent tellement bien dans cette vie monastique, éloignée des folies du monde, il croise un maître qui lui dit « la médecine c’est une voie vers l’éveil pour les occidentaux, tu ne dois pas renoncer à la médecine ». Laissé à son propre choix, il décide de revenir à Paris, à la médecine, mais cette fois-ci il se met à « aider pour aider, et non plus à aider pour exister ». Le retour n’est pas sans difficultés : il n’a plus rien : ni appartement, ni argent, mais les propositions de travail arrivent très vite, tout est fluide. Seule sa vie sentimentale reste vide pendant plusieurs années. Il admet ainsi très humblement, que face à ses patients, il se dit souvent, « s’ils savaient … ce vide affectif en moi… ».
Christophe Fauré nous livre ensuite les enseignements de son parcours, de l’enseignement bouddhiste : • La liberté : on l’a tous • La psychologie et la spiritualité sont des chemins complémentaires : il est nécessaire de soigner ses blessures et un travail thérapeutique est parfois indispensable pour cela ; la spiritualité, c’est une composante essentielle de notre être, à accepter pour ne pas suffoquer. • « Le vide est la forme, la forme est le vide » (Bouddha) : tout est un, il y a le manifesté, et le non-manifesté. Il est nécessaire d’apaiser son esprit pour pouvoir l’observer. • Teste par toi-même les enseignements que tu reçois • Soit généreux, en transmettant tes expériences par exemple • Fais de ton mieux pour donner la meilleure version de toi-même : pour cela patience et efforts sont nécessaires • Soit inspiré et inspire à ton tour : reconnais tes « enseignants », quels qu’ils soient.
Pour lui l’Eveil, le Bonheur, c’est l’union d’une « sagesse conceptuelle » (la « méditation-coussin » telle qu’il l’appelle : on s’assied et on médite), d’une « sagesse non-conceptuelle » (« hors-coussin »), composée d’enseignements et de pratiques, et de la compassion, notre capacité innée à aimer.
Psychiatre spécialisé dans les soins palliatifs et l’accompagnement du deuil, il rapporte les paroles des mourants, leurs regrets : « j’aurais du aimer mieux, j’aurai du me laisser aimer ». Il révèle également deux questions que rapportent les personnes ayant eu des NDE (Expériences de Mort Imminente) : • Comment as-tu aimé ? • Qu’as-tu appris ?
Selon lui, se donner la paix à soi-même n’a de sens que si on redonne cette paix au monde. D’où son choix de revenir dans le « monde réel », loin du calme monastique. C’est un peu le parcours du héros, tel que présenté dans de nombreux mythes : une fois arrivé à son but, après maintes épreuves, le héros revient à son point de départ pour redonner le cadeau qu’il a reçu.
Enfin selon lui, la souffrance est une opportunité de changement, c’est le moment de se poser la question : « que fais-je de ce qui m’arrive ? ». La spiritualité donne le sens, c’est-à-dire à la fois, la direction à donner à notre vie, et la signification de notre vie. Et c’est de notre responsabilité que de trouver l’inspiration : à travers les rencontres, les lectures, les enseignements, etc.
Et pour terminer ce résumé, je rajouterai juste ici la question d’un spectateur à la fin de la conférence : « finalement, quand on arrive à dire aux gens qu’on aime qu’on les aime, est-ce ça veut dire qu’on s’aime un peu aussi ? ».
Laurence Lépine, le 12 novembre 2019

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